mercredi 30 septembre 2009

Ma famille est normale

Il y a quelques jours, je suis allé voir au cinéma le dernier film de Christophe Honoré, «Non ma fille, tu n'iras pas danser». Basculant sans cesse entre ironie et gravité, cette histoire raconte la vie d'une femme qui vient de quitter son mari après avoir appris qu'il la trompait. Elle a donc fui avec ses deux jeunes enfants et essaye à la fois de digérer l'échec de son couple et de reconstruire sa vie seule, en attendant mieux. Pour l'aider, il y a sa famille : ses parents, sa petite soeur et son petit frère.

Malheureusement pour elle, au lieu de la soutenir, son entourage l'enfonce, ne manquant jamais une occasion, que ce soit sur un ton compatissant ou brutal, de lui rappeler qu'elle ne s'en sort pas. Cette femme, à l'aube de la quarantaine, se bat donc comme elle peut, mais finit par échouer et abandonner.

Le but de mon post n'est pas de défendre ou d'accabler cette femme. Non, ce qui m'a frappé à la vision de ce film, c'est, par opposition à ce que j'avais sous les yeux, l'étonnante normalité de ma propre famille. L'héroïne est pour le moins fragile psychologiquement, si ce n'est plus. Certains diraient même à moitié folle. Et elle transmet sa fragilité à ses enfants, qui ne sont pas les plus équilibrés du monde. Sa relation avec son ex-mari, lui-même pas tout à fait serein, est assez tendue et violente, dans l'amour ou dans la haine. Ses parents, qui aimeraient l'aider, s'y prennent tellement mal qu'ils l'étouffent et la font culpabiliser. Comme ils s'emmerdent dans leur propre vie, il se permettent d'interférer dans celle de leur fille comme bon leur semble, sans prendre garde aux dégâts qu'ils pourraient faire. Sa petite soeur, qui a déjà un enfant, en attend un deuxième. Elle gère très mal cette grossesse car elle n'aime plus son mari, qu'elle traite comme de la merde. Elle est jalouse de son aînée, à qui elle reproche mille et une choses, mais se rend compte qu'elle n'est pas capable de faire mieux : son couple est également un échec. Enfin, le petit frère, personnage lunaire et désinvolte, regarde d'un oeil mi-amusé, mi-désabusé, sa famille se battre et se débattre.

Je sais bien que tous ses personnages sont fictifs et sortent de l'imagination d'un scénariste. Mais ils semblent pourtant très réalistes, et à vrai dire, font assez peur. En effet, comment l'héroïne pourrait-elle ne pas devenir folle dans une telle famille de fous ? Alors oui en effet, quand je pense à mes parents, qui s'aiment et vivent ensemble depuis 40 ans, qui ne se disputent quasiment jamais, qui ont élevé dans la sérénité et l'harmonie leurs deux enfants, je me dis qu'ils sont étrangement "normaux". Quand je pense à mon frère, qui a réussi professionnellement, qui est équilibré, dynamique, toujours entre deux avions à parcourir le monde, je me dis mais quel horrible secret cache-t-il ? Et même si je regarde plus loin, mes grands-parents, mes oncles et tantes, mes cousins, nulle trace de maladie mentale, de psychodrames ou autres délicatesses du même genre. Nos réunions familiales (mariages, baptêmes, enterrements) se passent toujours bien, sans que personne ne quitte la table en jetant son verre ou en claquant la porte. J'imagine bien qu'il y a quelques secrets qui traînent, quelques cadavres dans les placards, je ne suis pas naïf, mais en comparaison du tableau que dresse ce film, c'est peace and love! Alors oui, je crois bien que ma famille est dramatiquement normale. Est-ce un mal ou un bien, je n'en sais strictement rien...

Et vous, votre famille, elle est comment ?

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