samedi 12 septembre 2009

Cannonball

Aujourd'hui je suis tombé amoureux... Cela m'arrive parfois, quand je me promène dans Paris, ou ailleurs. Ça me tombe dessus, sans prévenir, sans que je m'y attende. Je vois une fille, et mon coeur est ébranlé.

Je prenais le métro pour regagner mon domicile du 18e arrondissement. Tranquillement, patiemment même, j'attendais que ma rame préférée pointe le bout de son nez. Quand ELLE est apparue. Tout d'abord ce ne fut qu'une vision lointaine, comme un mirage. Puis elle s'est rapprochée de moi à mesure que ses pas la portaient sur le quai. Bientôt, elle était à côté de moi. Sur mon lecteur MP3, j'écoutais "She", d'Elvis Costello. Il aurait fallu être aveugle, et encore, pour ne pas la remarquer. Il faut dire que toute vêtue de rouge et de noir, elle ne passait pas inaperçue. Un bandeau rouge cernait ses cheveux blonds, un pull noir recouvert d'une longue et épaisse écharpe rouge entourait son cou. Une jupe noire recouvrait ses hanches jusqu'en dessous des genoux. Enfin ses pieds reposaient dans de somptueuses bottines rouges. Bref, Jeanne Mas aurait sûrement été fière en la voyant.

Elle ne devait pas avoir plus de 25 ans. Son visage poupin me fit tout de suite penser qu'elle était russe. Elle avait un air russe : à la fois beau et sévère. Elle était fine et grande, elle devait certainement être danseuse, ou artiste (je ne sais pas pourquoi mais elle devait forcément faire quelque chose avec son corps). En tout cas, elle n'était certainement pas serveuse chez Mc Do... Un détail m'amusa. Après avoir fini une conversation sur son mobile, elle le remit immédiatement dans son emplacement, à l'intérieur de sa bottine gauche. Moi qui me suis fait voler trois portables en un an, j'ai trouvé cette précaution très judicieuse.

Bien sûr, je n'ai pas bougé le moindre petit doigt. Je suis resté là, à côté d'elle, à l'observer en essayant de ne pas me faire remarquer. La musique retentissait dans mes oreilles et son charme me retournait le coeur. Qu'aurais-je bien pu faire d'autre de toute façon ? Je ne parle pas russe. Je crois que nos regards se sont croisés pendant quelques instants. Etant donnée la façon dont je la fixais, c'était difficilement évitable. A-t-elle remarqué que je l'avais remarquée ? C'est possible, mais cela n'a rien changé. Peut-être aurais-je dû lui sourire ? Mais on ne se refait pas, je ne sais pas aborder les femmes, encore moins quand elles me plaisent.

Le métro est enfin arrivé. Par le jeu des va et vient à l'intérieur de la rame, je me suis retrouvé juste derrière elle, à quelques centimètres de son corps. J'ai fermé les yeux et je me suis imaginé lui adresser la parole, lui dire «bonjour, je vous trouve belle et attendrissante, j'aimerais vous inviter à boire un verre.» Bien sûr, elle aurait dit oui, en me souriant. Lors de ce premier rendez-vous, je lui aurais plu, elle aurait eu envie de me revoir. On aurait commencé à devenir proche, on aurait appris à se connaître, à s'apprécier, à avoir envie l'un de l'autre. Un soir, au pied de son immeuble, nous nous serions embrassés. Elle m'aurait promis son coeur, son corps. Et elle me les aurait offerts. Ensemble, nous aurions trouvé un appartement pour partager nos vies, nos envies, nos coups de blues. Un jour je lui aurais posé une question, elle m'aurait répondu "oui". Et puis Chloé serait née. Arthur l'aurait suivi deux années après. Et nous aurions vieilli tous les quatre ensemble.

Mais il fallait que je descende du métro, j'étais arrivé à destination. Je suis sorti sans me retourner, elle ne m'a pas retenu, nos chemins se sont séparés. Et je suis rentré dans le froid et la nuit à mon appartement, à ma solitude. Mais qui sait, peut-être que demain je retomberai amoureux...

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