mercredi 14 avril 2010

L'humaniste misanthrope

Tous autant que nous sommes, nous nous affirmons par nos paradoxes. Eternels insatisfaits, nous souhaitons tout et son contraire, et sommes incapables, pour la plupart, d'attraper le bonheur et le garder près de nous. En tant que membre de la race humaine, je ne déroge pas à cette règle. Et parmi ces paradoxes qui m'affectent, il y en a peut-être un plus présent que les autres : je suis un humaniste misanthrope.

Je suis humaniste parce que j'aime mon prochain, et ma prochaine. Avec les gens qui me sont proches - ami(e)s, famille -, j'essaye, du mieux possible, d'être à l'écoute, d'aider, de soutenir, d'encourager, d'être présent dans les moments heureux et les moments durs, de me montrer généreux, tolérant et compréhensif, qu'ils puissent ainsi dire qu'on peut compter sur moi. J'échoue parfois, mais je fais toujours de mon mieux.

Je suis misanthrope parce que je n'aime pas l'être humain, sa nature profonde, sa substantifique moëlle. Je peux aimer ce qu'il fait, ce qu'il conçoit, ce qu'il fabrique, ce qu'il construit, ce qu'il imagine, ce qu'il créé, mais je n'aime pas ce qu'il est. Il est le plus souvent détestable, hypocrite, égoïste, manipulateur, lâche, cruel, et c'est encore pire au sein d'un groupe qu'individuellement. Je reconnais cependant qu'il m'arrive aussi d'être ainsi, bien évidemment, en tant que membre de cette espèce.

Je dois donc faire cohabiter en permanence ces deux tendances en moi, car je ne suis pas encore prêt à vivre en ermite, même si j'en ressens parfois le désir. Me couper du monde est impensable. J'ai besoin de contacts humains, je ne peux pas m'en passer, mais en même temps j'ai beaucoup de mal à accepter tous les compromis, toutes les bassesses, toutes les hypocrisies qui sont nécessaires à la vie en société. J'ai parfois beaucoup de mal à me reconnaître et à trouver ma place dans la société qui m'entoure. J'ai l'impression qu'elle ne me ressemble pas, même si j'en fais irrémédiablement partie.

5 commentaires:

Sebby a dit…

Le misanthrope que je suis se sent particulièrement en accord avec cet excellent article ;)

Roxane a dit…

Idem ...

Anonyme a dit…

Malgré le paradoxe apparent, humanisme et misanthropie sont en fait inséparables. L'humanisme n'est pas un amour naïf des Hommes qui pousserait à accepter le monde tel qu'il est, ses pires défauts compris. Ca c'est plutôt de la bêtise. Au contraire, l'humanisme est une haute estime du genre humain, exigente. Partant de là, comment le vrai humaniste pourrait-il tolérer les nombreux travers de cette humanité qu'il voudrait plus raisonnable ?

Anonyme a dit…

Erratum : "exigeante"

Anonyme a dit…

c'est bien de constater que d'autres personnes ressentent également ce genre de sentiments